jeudi, juillet 12, 2007

Qui influence le plus le private equity européen ?

Impayables britanniques ! Il y a à peine un mois, le très honorable Peter Linthwaite, jusqu'à récemment à la tête du BVCA (British Venture Capital Association) l'association professionnelle des investisseurs en capitaux britanniques comparaissait devant la Chambre des Commons. Sur le thème – fort populaire on l'imagine – d'une sommation d'expliquer pourquoi les firmes de « private equity » et leurs partners-associés voyaient leurs gains en capitaux taxés à 10% alors que l'impôt nominal du régime commun est de 40% pour les tranches supérieures, il y eut une curée particulièrement saignante orchestrée par des membres du Parlement aux esprits passablement échauffés. Surpris par un tel hallali, incapable d'articuler une contre-argumentation cohérente, faisant pitoyable figure aux estocades dévastatrices des MP, le gentleman, dans toute la rectitude britannique qui s’impose, offrit dès le lendemain sa démission du BVCA.

C'est dans ce contexte de vitupérations moralistes du Parlement britannique que je trouve dans ma boîte aux lettres ce message venu d'outre-Manche :

Dear Reader,

Place your vote for the most influential person in the European private equity market, 2007, by replying to this email.

Please choose two people from the list of suggested candidates below and type them at the bottom of this text. You may also make an additional suggestion if you wish.

Please feel free to comment on the reasons behind your decision, which we may use on a non-attributable basis.

We are introducing just one rule this year: you can't vote for somebody at your own firm.

The Top 20 will be run in the August 17th edition of Real Deals.

Best wishes,
Ross Butler
Editor, Real Deals

Andrew Goodsell, Saga-AA
Angela Merkel, German chancellor
Anne Glover, Amadeus
Barry Maloney, Benchmark
Baugur, Jon Asgeith Johannesson
Ben Bernanke, Federal Reserve
Berlusconi, Silvio Berlusconi
Brendan Barber, TUC
Charlie McCreevy, EU Commissioner for Internal Market & Services
Conni Jonsson, EQT
Damon Buffini, Permira
Danny Rimmer, Index Ventures
David Bonderman, Texas Pacific Group
Dominique Senequier, Axa Private Equity
Donald McKenzie, CVC
Edmund Truell, Pensions Insurance Corporation
Francis Carpenter, EIF
Gordon Bonnyman, Charterhouse Capital Partners
Gordon Brown, UK Prime Minister
Guy Hands, Terra Firma capital Partners
Hector Sants, Head of FSA
Helmut Schusler, EVCA, Chairman
Herman Hauser, Amadeus
Ian Armitage, HgCapital
Javier Echarri, EVCA, secretary-general
Jean-Pierre Millet, Carlyle Group
Jeremy Coller, Coller Capital
Johannes Huth, KKR
John Kelly, Gala Coral Group
John McFall, chairman, UK Treasury Select Committee
Jon Moulton, Alchemy Partners
Jonathon Blake, SJ Berwin
Knut Kjaer, Norwegian Petroleum
Lindon Lea, Lion Capital
Lou Jinwei, China Investment Company
Luke Johnson, Risk Capital
Martin Halusa, Apax
Mike Smith, CVC Capital Partners
Mounir Guen, Mvision
Nicholas Ferguson, SVG
Nicolas Sarkozy, French president
Nigel Doughty, Doughty Hanson
Peter Wilson, HarbourVest
Philip Yea, 3i
Richard Lambert, CBI
Robert Lucas, CVC-Masterminded AA/Saga meger
Robert Tchenguiz, property entrepreneur
Robin Hall, Cinven
Sameer Al Ansari, Dubai International Capital
Sanjay Patel, Goldman Sachs Capital Partners
Sir David Cooksey, Advent
Sir David Walker, BVCA
Sir Ronald Cohen, Apax Partners
Stefano Pessina, Alliance Boots
Stephen Schwarzman, Blackstone
Tom Lamb, Barclays Private Equity
Volkert Doeksen, Alpinvest
Will Hutton, Head of Works Foundation
William Jackson, Bridgepoint
Wol Kolade, BVCA, Chairman

Il s'agit de désigner, aux voix de la communauté du « private equity » apparemment, la personne la plus influente pour le private equity européen. Le trophée remporté par le gagnant n'est pas précisé ! (On imagine bien un oral de rattrapage de chasse à courre dans les lambris de la House of Commons…)

Le lecteur attentif constatera avec surprise (ou résignation, c’est selon) que, vu de Londres, le peu de personnalités françaises qui sortent du lot sont notre président de la République nouvellement élu et Mme Sénéquier qui dirige les destinées d’AXA PE, le groupe de private equity de l'assureur. (Sûrement Mr Linthwaite, Esq. a été discrètement retiré de la liste.) On y trouve également côte à côte M. Brown, Mme Merkel et M. Berlusconi dont les opinions et les agissements sur le sujet ne peuvent être plus opposés. Plus curieux : on y trouve également le nom de M. Schwarzman le chef d'orchestre de l'oeuvre magistrale constituée par la mise sur le marché de la société de gestion privée américaine Blackstone (et dont il devrait d’ailleurs tirer à titre personnel un peu plus de 1,6 milliard de dollars). De ce qu'il me semble, l'influence majeure sur la pratique européenne de toutes ces éminentes personnalités est d'avoir réussi à importer sans frais en Europe le moralisme tatillon et vétilleux verrouillant progressivement, après l'arrivée des « neo-conservateurs » aux affaires et l'explosion de l'affaire Enron, les opérations au capital des sociétés privées aux Etats-Unis.

En France, que l’on sait furieusement fâchée avec le capitalisme et la mondialisation, alors même que le gouvernement se targue de « moraliser l'économie » tout en souhaitant favoriser l'innovation - ne vient-on pas de « labelliser » la place financière de Paris pôle de compétitivité à grands renforts de déclarations patriotiques ? - le même son de cloche commence à faire distinctement entendre son tocsin.

Le projet de loi encadrant les « parachutes dorés » est examiné depuis le 10 juillet à l'Assemblée nationale. Naguère encore le ministre des Finances convoquait un entrepreneur indien à Bercy pour lui « expliquer la grammaire de l'économie moderne ». Avec les effets pédagogiques que l'on sait. Aujourd'hui le gouvernement « s'émeut » du régime fiscal auquel est soumis l'essentiel des revenus des gérants de fonds d'investissement et de celui des dirigeants des entreprises cibles des opérations de LBO (Leverage Buy-Out). Ces fonds déjà noyés sous le flot de critiques issues des syndicats, au motif inattaquable de la protection des salariés et de la trahison nationale par l'encouragement doucereux aux délocalisations, verraient donc un durcissement de la fiscalité de leurs revenus, la ramenant à celle du régime commun de l'impôt sur le revenu, un des plus hauts d'Europe. Comment Bercy pourra-t-il alors gérer cette nouvelle inclinaison tout en défendant « l'attractivité de la France » et la vocation mondiale du tout frais nouveau pôle de compétitivité ? Joli sujet pour un cahier de vacances studieuses chez les « dircabs » frais émoulus.

Comme on n'en est plus à une contradiction près, la ministre des Finances appelle aujourd'hui de ses voeux le retour de certains « nomades fiscaux » français (charitablement non identifiés) établis, par exemple, à Uccle ou à Gstaad, en agitant comme preuve de bonnes intentions une réduction (voire une disparition technique) de l'ISF. Il faut donc espérer que ceux-là mêmes ne sont pas gérants de fonds ni entrepreneurs ayant réussi leurs parcours professionnels, la surprise serait de taille ! On leur conseillera plutôt de réviser d'urgence le statut juridique des holdings (patrimoniales) en France, qui, mais pour combien de temps encore, volent sous le radar « moralisateur et responsabilisant » maintenant fort en vogue sous les ors de la République.

Pour en revenir aux nominations de la personne la plus influente sur le private equity Européen, j'avoue me perdre en hésitations et perplexités. Quel serait votre candidat favori ?

mercredi, juillet 04, 2007

Web 2.0 : hécatombe de CEOs ?

Dans le petit monde du Web 2.0, toujours bien près de l'ébullition - au sens « Internet » de la bulle - la nouvelle a circulé rapidement : Pierre Chappaz, par ailleurs fondateur de Wikio, annonce sa sortie des « pages de démarrage » Netvibes. Invoquant un désaccord (ancien) sur la vision de l'évolution des « univers Netvibes », Pierre Chappaz démissionne de son poste de co-CEO pour se concentrer sur son projet Wikio. On n'en sait guère plus sur le sujet de la confrontation des visionnaires mais la source des désaccords ainsi exposés fait l'objet d'innombrables supputations dans la blogosphère, à lire dans les agrégateurs majeurs comme... Wikio.

Il est vrai que les mouvements sont devenus perceptibles sur ce marché des « pages de démarrage » personnalisées. Outre le rival historique de Netvibes, Pageflakes, qui vient de recruter un nouveau CEO, Dan Cohen, issu de Google et de Yahoo!, les startups hyperactives comme Yourminis et Protopage, les géants du Web ont entamé des manoeuvres d'étouffement. La Google Home Page - qui semble-t-il a encore quelques marges de progrès au plan de l'intégration aux autres applications hébergées par Google -, les services Live de Microsoft, MyYahoo, dont Dan Cohen précisément était directeur, de Yahoo! et MyAOL de AOL marchent allègrement sur les brisées de ces pionniers.

L'accès individuel et personnalisé à l'information est considéré comme une manne attendant d'être monnayée. Et c'est à ce moment que dans la presse, on ne peut plus traditionnelle cette fois, on apprend le départ du Monde de Jean-Marie Colombani. Dans un long éditorial paru hier, Jean-Marie Colombani se plaît à rappeler comment, sous sa direction, Le Monde a su répondre au défi du Net : « il profite [Le Monde] désormais de l'éclatant succès de nos investissements sur le Net, à travers Le Monde interactif ».

Dans la blogosphère, le point d'ébullition aussi est proche. Technorati, la vedette des moteurs de recherche et de classement des blogs annonce le départ de ses trois poids lourds de management : Dave Sifry, le CEO visionnaire qui a fondé la société, Tantek Celik, son CTO génial également co-inventeur des « microformats » dont l'usage se répand actuellement pour instiller un peu de sens dans les pages HTML, et Liz Dunn, Product Manager. Dans la rumeur persistante de bruits de bottes des financiers de Technorati (Mobius Venture Capital, le fonds géré par Heidi Roizen dont les vétérans fanas Macintosh se rappelleront comme fondatrice et dirigeante de T/Maker en 1986, et Draper Fisher Juvertson le fonds de la superstar Tim Draper dont on ne présente plus les excentricités), Technorati perd ainsi la plus grande partie de son management.

Un vent mauvais serait-il en train de se lever ? Même Bill Gates aurait perdu son rang d'homme le plus riche du monde, surclassé par un industriel mexicain du nom de Carlos Slim. Décidément la haute technologie n'est plus ce qu'elle était...

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